Coucher de soleil [PV Shânylla]

Naëma et Shânylla finissaient de gravir la Montagne d'Or. La Créature, sous la forme d'une renarde, avait finalement décidé de marcher à côté de son amie pour ne pas la fatiguer inutilement.

- On arrive juste au bon moment ! s'exclama-t-elle joyeusement en voyant les derniers rayons du soleil couchant éclabousser d'or tout l'horizon qui flambait devant eux. [J'adore cette formule, que le soleil "éclabousse" l'horizon. ]

Elle se changea en faucon pour aller plus haut et monta en flèche pour admirer le coucher de soleil.

- C'est magnifique ! cria-t-elle.

Shânylla sourit devant le magnifique spectacle qui s'offrait à elle. Le ciel se teintait de rouge et de rose, avec déjà une bande plus sombre en haut... Quant à la colline, elle semblait vraiment en or pur. Shânylla s'assit, quelque peu faiguée par l'ascension. Fatiguée, mais pas déçu !

- J'aimerais tellement pouvoir profiter de ce spectacle sans avoir à me cacher, ou à déclencher une guerre pour avoir la montagne !

Naëma redescendit vers elle et se posa à ses côtés, conservant sa forme de faucon qu'elle trouvait, après réflexion, assez sympathique.

- Pour le moment, on est seules, dit-elle doucement. Et de toute façon, ajouta-t-elle joyeusement, on se débrouille assez bien au combat pour s'enfuir si nécessaire !

- Oui, tu as raison. Il m'arrive d'être bien pessimiste, parfois ! soupira Shânylla.

Mais cette fois, c'était un soupir d'extase. Le ciel était tellement beau ! L'elfe s'assit sur un rocher. Elle sembla hésitante puis dit timidement :

- Euh... Naëma... Tu peux changer de forme ?

Shânylla contemplait les serres énormes de l'oiseau de proie avec inquiétude. Sous le regard étonné de son amie, elle expliqua :

- C'est que tu me fais un peu peur...

Peur... ?

Sans savoir exactement pourquoi, Naëma se sentit blessée par la remarque de Shânylla. Doucement, et un peu tristement, elle se transforma en chaton.

- Là, au moins, je ne pourrais rien te faire... dit-elle avc amertume.

[Les faucons, c'est pas très gros tu sais. ]

Shânylla sentit l'amertume dans la voix de Naëma. Le rouge lui monta aux joues et elle bafouilla :

- Je... Je ne voulais pas te blesser... Mais tes serres... Je... J'ai un peu peur des oiseaux de proie. Ca a dû se déclencher dans mon enfance... Je ne sais pas pourquoi... Mais ce n'est pas ta faute ! C'est moi qui suis un peu... Un peu...

- Oui, oui, je comprends, la rassura Naëma avec un sourire.

C'est mon amie. Ce n'est pas parce qu'elle a peut d'une forme que je prends que je dois m'éloigner d'elle !

Elle sourit un peu plus franchement et recula imperceptiblement. Brusquement, sans prévenir, elle bondit sur Shânylla toujours en conservant sa forme inoffensive de chaton.

- Toujours aussi peur ? plaisanta-t-elle.

Shânylla bascula en arrière et, par réflexe, se couvrit le visage de ses mains.

- C'est malin, grogna-t-elle mi-figue mi-raisin.

Shânylla, à son plus grand étonnement, sentit Naëma se lover contre sa poitrine. D'abord surprise, elle sourit et carressa le petit chat. Elle aussi se sentait bien, ce doux ronronnement l'apaisait...

Shânylla remarqua à son tour la brillance des Montagnes.

- C'est notre bonheur qui les illumine, murmura-t-elle. Le bonheur de l'amitié, l'amitié de deux peuples différents...

Naëma sourit.

- Tu fais de la poésie maintenant ? murmura-t-elle. Mais c'est vrai que c'est joli, cette formule.

- Ce n'est pas joli, et ce n'est pas de la poésie... C'est juste la vérité.

Shânylla gratta son amie entre les oreilles.

Naëma se redressa.

- Si je te dis que c'est joli et que c'est de la poésie, ça en est, assura-t-elle avec un grand sourire.

- Si tu insistes... L'ascension m'a fatiguée, reprit-elle. Tu n'aurais pas un truc à manger ?

- Non, s'excusa Naëma, mais par contre je connais de très bon terrains de chasse dans la Forêt des Songes. Tu sais chasser ?

- Si je sais chasser ? Mais pour qui tu me prends ? Pour une fille à papa ?

Mais c'est ce que j'étais, dans mon enfance... Mon enfance... Je ne dois pas penser à ça !

- Sauf que redscendre va m'épuiser encore plus. Et puis... La forêt des songes, c'est chez les elfes noirs.

- Oui, c'est vrai, reconnut Naëma.

A force de se promener dans tous les territoires sans se préoccuper de leur propriétaire, elle en avait oublié quel endroit appartenait à qui.

- Bon, dans ce cas... Tu veux faire quoi ? demanda-t-elle avec un grand sourire.

- Je ne sais pas.

Shânylla regarda le ciel, la raison de leur présence ici, et soupira d'aise.

- Tant pis pour mon estomac, je voudrais rester ici...

Naëma se changea en louve et s'étendit sur le sol en bâillant.

- Il commence à faire tard. On peut peut-être dormir à la belle étoile, ça te dit ?

- Evidemment ! Mais je n'ai pas ta fourrure... Tu m'aides à faire un feu de camp ?

Shânylla commençait à s'emparer de bois sec et de feuilles mortes, ravie. Dormir à la belle étoile était si agréable !

Un feu de camp ?

Enthousiasmée par cette idée, Naëma se releva d'un coup et commença à ramasser du bois mort, les portant dans sa gueule jusqu'au tas qu'avait monté Shânylla. Une fois que le tas fut bien haut, elle s'assit devant et réfléchit à un moyen d'allumer le feu.
Une idée lui traversa l'esprit et elle sourit. Elle s'éloigna du tas de branches mortes et se métamorphosa en un petit dragon, un peu pataud et lourd sur pattes, qui souffla maladroitement une petite flamme sur le bûcher qui s'embrasa aussitôt. Soulagée, Naëma récupéra sa forme de louve et s'installa confortablement devant le feu, éclairée par la flamme dansante.

- Les étoiles sont belles, murmura-t-elle.

Shânylla, n'étant pas spécialiste des feux de camps, se demandait comment allumait le feu de camp quand son amie se métamorphosa en dragons et cracha une flamme avant de retourner s'asseoir. Un peu impressionnée, l'elfe resta un instant bras ballants puis se reprit et s'assit aux côtés de son amie.

- Oui, dit-elle, les étoiles sont vraiment magnifiques !

Elle resta silencieuse un instant. Shânylla était sociable, elle aimait discuter et une conversation pareil, ou chacun répète les paroles de l'autre, n'avait pas vraiment d'intérêt pour elle. C'est pourquoi elle se risqua à demander, hésitante :

- Je ne t'ai jamais vu sous une forme d'elfe ou d'humaine... Enfin, autre qu'un animal !

- Ah bon, jamais ? s'étonna Naëma. D'accord, je ne me transforme pas très souvent en elfe, mais je me sers beaucoup de ma forme humaine...

Elle se leva et s'étira avant de se transformer en une jolie jeune fille aux longs cheveux bruns. Avec un sourire, elle se rassit près du feu.

- Et voilà !